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L’avenir du fleurissement hors-sol face aux exigences du développement durable

10/04/2025
Face aux évolutions des perceptions engendrées par la montée en puissance de la question environnementale et la confusion qui gravite autour de la définition du développement durable, certaines techniques utilisées par les collectivités semblent être remises en question. A tort ou à raison, l'utilisation des méthodes de fleurissement hors-sol semble susciter certaines critiques.
L’avenir du fleurissement hors-sol face aux exigences du développement durable
Si les bacs d’orangerie agrémentent les jardins à la française depuis le XVIIe siècle et que la solution des contenants est utilisée par les collectivités pour fleurir leurs espaces publics dès le début de la démarche de fleurissement, les suspensions datent quant à elles d’une période beaucoup plus récente puisqu’elles sont développées par la ville de Nantes dans les années 80 et commercialisées par la société Atech sous le nom de Sifu®. Cette technique rencontrera le succès qu’on leur connait aujourd’hui. Phénomène de mode ou réponse technique miracle ? Certainement un peu des deux. Quoi qu’il en soit, face à la montée en puissance de la question environnementale et la prise en compte du développement durable dans les stratégies politiques, le fleurissement hors-sol semble aujourd’hui susciter certaines interrogations de la part des élus, des gestionnaires municipaux, des membres des jurys du concours des Villes et Villages Fleuris ainsi que de la population.
Une étude fine du choix d’implantation au regard du contexte et des contraintes de gestion permet d’obtenir un résultat optimal.
Les techniques contemporaines de fleurissement hors-sol permettent de laisser libre cours à l’imagination des jardiniers tout en respectant les principes du développement durable.

Le succès du fleurissement hors-sol

Face aux contraintes liées à l’implantation du végétal et des compositions florales, en particulier, dans l’espace public, les collectivités ont très rapidement adopté des modes de fleurissement hors-sol. Tous types de contenants imaginables ont ainsi pu être utilisés, du pneu de tracteur au mobilier dédié, en passant par la buse béton initialement réservée au réseau de traitement des eaux usées. Ces modes de substitution aux plantations en pleine terre offrent une série d’avantages évidents pour les gestionnaires des espaces publics. Ils permettent d’abord d’implanter aisément une composition dans des espaces très minéralisés de centre bourg par exemple, ou viennent compléter des aménagements qui ne laissaient que peu de place aux massifs floraux lors de leur conception. Ils répondent, par ailleurs, aux contraintes techniques de certains espaces peu propices à la plantation classique, pour des raisons de passage de réseaux en sous-sol ou de qualité du sol urbain. Ce type de mobilier est en outre largement utilisé pour répondre aux contraintes de circulation et de stationnement et permet de faire face à certaines pressions exercées par des actes d’incivilité ou de vandalisme. La facilité d’implantation de ces supports de culture, associée à une tendance dans les années 1970 et 1980 à favoriser l’approche purement horticole du fleurissement, valorisée à ce moment par le concours des Villes et Villages Fleuris, expliquent en grande partie le succès des techniques horssol en milieu urbain. La culture des bacs peut s’effectuer en amont de leur implantation, permettant ainsi d’apporter la composition déjà épanouie. Leur mode de culture s’opère de façon méthodique et quasi mécanique et ne nécessite pas d’étude spécifique en amont. Cette technique offre enfin une grande souplesse à l’aménagement et permet selon les stratégies une dispersion aisée sur le territoire, voire une mobilité en fonction des événements. Leur implantation semble d’ailleurs répondre à des volontés politiques de marquer tout ou partie du territoire en période électorale…
Le fleurissement hors-sol peut accueillir des décorations saisonnières et thématiques.

Les défauts de ses qualités

Les avantages indiscutables des modes de culture hors-sol ne sauraient toutefois masquer une utilisation parfois inadaptée de ce type de mobilier et de leur contenu. Leur utilisation est très souvent le fruit d’un choix par défaut pour répondre en premier lieu à des contraintes, une mesure compensatoire qui ne répond pas à une démarche d’aménagement durable. Le résultat obtenu est très souvent peu satisfaisant par manque de réflexion sur le choix de l’aménagement au regard de l’impact visuel ou de la contrainte de gestion. Ainsi, certaines collectivités se sont spécialisées dans la collection de contenants et exposent l’histoire du hors-sol dans l’espace public, avec toutes les contradictions esthétiques et d’intégration paysagère que cela engendre. Sans compter qu’un grand nombre de bacs restent vides ou présentent une composition hors échelle une grande partie de l’année. Ces excès témoignent des carences de prise en compte de la gestion lors du choix d’implantation de ces supports. Le travers de l’excès est très souvent à l’origine des défauts d’échelle ou d’entretien des compositions. La facilité d’implantation du contenant n’induit pas la facilité d’entretien de son contenu et les gestionnaires se retrouvent très souvent confrontés à des contraintes d’entretien très lourdes qui nuisent à la qualité. Par ailleurs, leur pré-culture et leur caractère mobile généralisent un travers esthétique très courant. Le choix des compositions ne se fait souvent pas en cohérence avec celui opéré pour les massifs au sol et nuit à la lisibilité esthétique de l’ensemble.

Durable, le fleurissement hors-sol ?

Durable, c’est-à-dire écologique, économique et social. Certainement, car le fleurissement hors-sol est écologique car :
- il a le mérite d’embellir et de végétaliser des lieux pour lesquels il n’existe pas d’autres alternatives végétales ;
- il est un relais de biodiversité végétale et animale dans la ville, les insectes peuvent s’y nourrir, s’y réfugier ;
- avec la consommation annuelle d’un seul foyer, on peut arroser 150 à 200 jardinières ;
- les fabricants et les fournisseurs sont engagés dans des programmes d’éco-conception qui permettent d’améliorer les performances et la durabilité des contenants (sélection des matériaux, procédés de fabrication, recyclage…) ;
- il permet d’accueillir des collections végétales qui doivent être hivernées… . économique et social car :
- il fait partie du savoir-faire horticole français et de l’exemplarité du fleurissement national, de notre culture. Ainsi de nombreux fabricants exportent leurs produits et leurs services dans le monde entier ;
- il génère de nombreux emplois dans la filière horticole française (obtenteurs, producteurs, fabricants, collectivités…) ;
- il permet de végétaliser et de fleurir des quartiers où les massifs sont vandalisés. Le fleurissement hors-sol est alors une technique ‘anti-vandalisme’ qui est visible de tous, profitable à tous et plus économique dans certaines situations ;
- il participe à l’identité végétale et à l’animation commerciale, touristique… d’une rue, d’un centrebourg, d’un quartier ;
- il permet de réaménager des espaces urbains à moindre coût. Par exemple, des jardinières ou des bacs au sol peuvent être déplacés pour restreindre ou libérer certains accès à certaines occasions (marchés, foires…) ;
- il permet de déplacer certaines collections végétales ou certains végétaux exotiques qui doivent être cultivés en bacs, d’une année sur l’autre, dans les divers quartiers de la ville…
Tours possède une collection exceptionnelle de 40 bougainvilliers qui, sous ce climat, ne peuvent être plantés que dans des bacs d’orangerie !

Les évolutions du contexte, vers une stratégie d’aménagement et de gestion

Ces avantages et inconvénients du fleurissement hors-sol identifiés dès le début de leur utilisation soulignent l’importance du choix de leur implantation. L’évolution du contexte économique, environnemental et social laisse de moins en moins de place aux erreurs de jugement quant à ce choix. Les perceptions du public tendent à redonner au végétal la valeur symbolique de la nature, comme élément du vivant et support de la biodiversité. Cela ne veut en aucun cas signifier la disparition de la fleur dans l’espace public. Elle est elle-même protégée pas sa valeur symbolique porteuse de joie, d’espoir, de bonheur et d’accueil. Le challenge de la collectivité est aujourd’hui de répondre à une demande croissante de nature en ville tout en offrant à ses habitants et à ses visiteurs un environnement de qualité par le soin apporté à son cadre de vie. L’évolution des standards de gestion, d’une démarche horticole pure à l’approche de gestion différenciée ou d’écologie du paysage, répond à de nouvelles conceptions de l’aménagement du territoire et ne laisse que peu de place aux implantations hasardeuses. Le fleurissement horssol, au même titre que l’ensemble des éléments qui composent l’espace public, ne peut faire exception à cette approche d’aménagement global et durable. Il doit faire l’objet d’une étude rigoureuse lors du choix de son implantation et des compositions. Une analyse du contexte au regard des éléments physiques (couleurs, exposition, échelle,...), sociaux (usages, fréquentation, vitesses,...), culturels (identité, symboles, architecture,...) et écologiques (arrosage, consommation d’énergie…). Par ailleurs, la prise en compte de l’entretien et de la gestion de ce patrimoine, en amont de la commande, favorise à la fois sa bonne intégration et la qualité de leur contenu. Un choix qui ne peut faire l’économie d’une étude des contraintes liées aux déplacements, au temps de travail, aux obstacles et aux coûts d’entretien. La prise en compte de ces critères ne peut qu’aider à la pertinence de ce choix. Le fleurissement horssol trouvera dans ces conditions toute sa place dans l’espace public. Selon Mathieu Battais, le travail des jurys des concours des Villes et Villages Fleuris, à travers leur expertise et leur regard extérieur, consiste justement à analyser la pertinence de la stratégie d’aménagement et de gestion de l’espace public. Loin d’être un changement radical et simpliste de jugement en réponse au développement durable, cette approche complexe d’intégration du fleurissement hors-sol dans l’espace public nécessite de la part des membres du jury, des gestionnaires de l’espace public et des fabricants de mobilier une capacité de remise en question et une certaine forme d’ouverture d’esprit.
La facilité d’implantation des compositions hors-sol génère un travers très courant d’inadéquation avec les compositions en pleine terre. Cette superposition nuit de toute évidence à la lisibilité de l’espace.

Comment le fleurissement hors-sol peut-il accompagner les évolutions actuelles ?

Qu’elles soient issues des collectivités ou des entreprises, de nombreuses solutions techniques ont été mises au point pour répondre aux demandes des gestionnaires qui se trouvent confrontés aux enjeux du développement durable. En premier lieu, les matériaux ont changé. Les contenants sont en grande partie fabriqués avec des matières recyclées ou certifiées s’agissant du bois. Concernant la gestion de l’eau, les fabricants ont mis au point des systèmes de réserves qui, associés à certains substrats, permettent aisément de maîtriser l’arrosage par percolation ou hydroponie. Les fournisseurs de mobilier proposent d’ailleurs de plus en plus de solutions adaptées à chaque situation et apportent une plus value parfois décisive pour répondre à des demandes spécifiques. Car le problème n’est bien souvent pas d’ordre technique, mais bien du domaine de la commande. Une réflexion en amont permettra d’identifier la pertinence du lieu d’implantation et le type de composition que l’on souhaite apporter à l’espace. Le choix du type de mobilier devra se faire dans un second temps au regard de ces deux premiers critères. Aujourd’hui plus qu’hier, en matière de fleurissement hors-sol, il faut étudier les alternatives (plantation en pleine terre) et si le hors-sol est la solution, il faut alors choisir le type de contenants (volumes, hauteur, nombre et répartition des pots ou des suspensions sur l’espace), de composition végétale (en harmonie avec les couleurs, les arbres et les massifs alentours), gérer l’entretien (fertilisation, arrosage, entretien durant la saison). Tout doit être impeccable pour ne pas s’exposer à la critique. L’espace public est comme son nom l’indique un lieu ouvert à tous, géré par les contributions des citoyens. Les gestionnaires se doivent de leur offrir un cadre qui correspond à leur attente, dans le respect des enjeux économiques et environnementaux d’aujourd’hui. La question du hors-sol focalise l’attention d’un certain nombre de personnes de par ses caractéristiques techniques et la perception que l’on peut avoir de son entretien. Attention aux conclusions arbitraires qui viendraient critiquer trop hâtivement un mode de culture. A l’image de la mosaïculture qui a eu son heure de gloire, le fleurissement hors-sol a eu la sienne à tel point que certains abus ont pu générer des réactions de rejet. Or, chaque mode de culture peut avoir sa place dans l’espace public, à la seule condition que son choix soit subordonné à une réflexion en termes d’aménagement et de gestion.

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