À l’origine, le site accueillait une cité d’urgence construite à l’après-guerre. Après sa démolition, il n’est resté qu’un vaste ‘terrain flou’, réduit à un espace vert sans vocation clairement définie. C’est ce vide d’usage que la Ville d’Orly a souhaité transformer en un espace public attractif et fédérateur. Situé à un carrefour stratégique, bordé de plusieurs équipements publics, trois écoles, un collège, une médiathèque et un gymnase, le site est quotidiennement traversé par une population jeune et familiale. Pour répondre au manque d’espaces verts et de jeux, et renforcer les liaisons entre quartiers, la Ville a engagé la création d’un parc de 13 000 m², ouvert, accessible, sécurisé, et pensé comme un lieu de fraîcheur et de convivialité. Le parc se constitue aujourd’hui en “caisse de résonance”, un lieu de rencontre, dédiés à la jeunesse qui l’entoure, mais aussi pour l’ensemble des habitants du quartier
Un univers singulier et poétique
Le projet a été mené à bien par les agences Vé Paysages et Parkour Paysage et avec la participation de Butt-r-fly, illustrateur. Ensemble, les concepteurs ont imaginé un lieu immersif, propice à l’évasion. “Notre volonté était de donner du caractère à ce parc et d’inviter les habitants à entrer dans un ailleurs”, explique Blaise Pons, paysagiste-concepteur et dirigeant de Vé Paysages, habitué à travailler la scénographie paysagère pour les parcs à thème.
Le marqueur du site, une imposante sculpture représentant un oiseau-pylône, haut de 20 m et longue de 40 m, érigée en 1986, a questionné l’équipe : “Quand nous sommes arrivés sur le site, la première chose que nous avons remarqué, évidemment, c’est L’Oiseau pylône. Au début, nous l’avons trouvé trop imposant et quelque peu agressif et puis, rapidement, nous avons fini par l’apprivoiser. Nous avons réalisé que cet oiseau était une chance et sa présence nous a inspiré la conception du parc.” Non mentionnée dans le programme, l’œuvre a finalement été mise en valeur, devenant l’une des entrées, que l’on traverse en passant sous sa structure. “Nous avons suggéré à la maîtrise d’ouvrage de renommer le parc en référence à cet oiseau, pour souligner son rôle dans l’identité du lieu et donner une portée plus poétique à cet espace”, précise encore le responsable du projet et poursuit “Cet oiseau, aujourd’hui, donne l’échelle aux aménagements alentours. C’est lui qui a déterminé la dimension et l’esthétique de l’aire de jeux et de la fontaine. Nous avons voulu développer un univers et raconter une histoire en lien avec l’Oiseau pylône”.
Connecter les quartiers et créer une centralité
Pour améliorer les connexions interquartiers et apaiser les abords du site, le projet a entièrement repensé les circulations, autour et à l’intérieur du parc. Le stationnement a été réorganisé le long du collège et une rue a été dévoyée pour rejoindre directement l’axe du nouvel espace vert, aujourd’hui traversé d’est en ouest par une voie douce. La topographie, auparavant entièrement plane, a également été retravaillée afin d’apporter du relief, structurer les ambiances et isoler le parc de la circulation de l’avenue Marcel Cachin.
À l’intérieur, les cheminements ont été dimensionnés pour accueillir les flux importants générés par la présence immédiate des établissements scolaires. “Nous avons dessiné de larges allées en lignes brisées, avec des tracés en zigzag dynamiques, inspirés par l’esthétique industriel de l’oiseau et de l’énergie “électrique” des jeunes usagers”, explique Blaise Pons.
Ces circulations convergent vers une croisée centrale, mise en valeur par une aire de jeux monumentale conçue sur mesure. “Nous avons pensé le parc comme le prolongement d’une cour de récréation”, souligne Blaise Pons. Il poursuit : “Il fallait un équipement à l’échelle de l’Oiseau-pylône, à la fois visible, ludique et qui puisse donner du caractère au parc”. Le jeu est composé de trois œufs suspendus à des hauteurs différentes. Ces œufs sont en inox et en acier galvanisé, et l’intérieur en bois. Un jeu d’aspect futuriste qui culmine à 13 mètres de hauteur.

Initialement présente, une imposante sculpture représentant un oiseau-pylône constitue l’un des marqueurs emblématiques du site.
Une fontaine paysagère devenue aire de jeux
Autre pièce maîtresse du projet : la fontaine sèche “Canyon”, une rivière artificielle de 30 mètres conçue sur mesures par la maitrise d’oeuvre et construite par l’Atelier artistique du béton (AAB) et l’entreprise ECF Fontaines. Inspirée des techniques constructives des décors de parcs à thème, elle évoque un cayon au cœur d’une prairie planté de conifère, un paysage s’inspirant des Rocheuses américaines, avec des rochers sculptés en béton décoratif et une variété d’effets d’eau : brumisateurs, jets en cloche, cascades et parois suintantes. Accessible aux personnes à mobilité réduite grâce à une rampe intégrée, cet espace de fraîcheur fonctionne durant l’été et propose une expérience ludique très prisée des habitants. “Cette rivière canyon s’est rapidement transformée en aire de jeux, notamment d’escalade, fréquentée toute l’année, et participe pleinement à l’identité du site”, commentele concepteur.
Végétaliser sans import de terre
Les équipes de l’entreprise du paysage SFE91 ont aménagé le parc sans aucun import ni export de terre. Les terrassements ont été réalisés exclusivement à partir des déblais et remblais du site, les sols enrichis avec du fumier de cheval provenant d’un centre équestre local.
Côté végétation, plusieurs ambiances ont été pensées pour structurer l’espace et offrir une expérience immersive. D’un côté, une prairie engazonnée largement ouverte, ponctuée de Picea omorika, conifères adaptés aux sols secs, vient compléter l’univers inspiré des montagnes Rocheuses.
De l’autre, un espace boisé associe les arbres existants - érables et tilleuls - à une nouvelle palette d’essences locales sélectionnées pour créer une ambiance de sous-bois. Cette composition intègre des arbres endémiques comme des merisiers, des bouleaux, des hêtres, des saules et des chênes. Des massifs de vivaces et graminées plantées de carex pendula, d’euphorbes, d’hellébore fétide, de molinie, de sauges animent les sous-bois
En lisière, des haies bocagères préservent l’intimité des logements voisins. Elles sont composées d’essences rustiques telles que l’érable champêtre, le noisetier, l’aubépine et le troène, également accompagnées de vivaces.
Une large noue encercle le parc et recueille les eaux pluviales, tandis que les allées, légèrement surélevées par rapport aux pelouses, orientent leur évacuation vers les zones engazonnées favorisant leur arrosage.
Des bancs conçus sur mesure en bois de chêne et acier galvanisé parachèvent la conception du parc et offre un conforme supplémentaire aux usagers
Rapidement adopté par les habitants pour la qualité de ses usages et son univers immersif, le parc de l’Oiseau incarne une nouvelle génération d’espaces publics à la fois accessibles, immersifs et résilients. Une démarche saluée par une nomination aux Victoires du Paysage 2024.