Construit dans les années 1960, le quartier Saragosse, qui compte aujourd’hui près de 14 000 habitants, fait l’objet d’un ambitieux projet de requalification. L’objectif est de transformer durablement son image, d’améliorer la qualité de vie des habitants et de réorganiser son fonctionnement urbain. Au coeur de cette transformation, les espaces publics sont repensés pour devenir des lieux de convivialité, de rencontre et de vie partagée. L a première phase du projet a porté sur le réaménagement du parc central existant à Saragosse. La deuxième phase visait à connecter les différents parcs situés à l ’arrière des immeubles afin de créer une grande promenade urbaine de 1,7 km. Ce parcours paysager, traversant le quartier d’est en ouest, favorise la mobilité et renforce la cohésion entre les différents secteurs du territoire. L’extension du parc du Noulibos occupe une position particulière dans ce dispositif. Elle assure la connexion entre le grand parc central de Saragosse et la promenade interquartier et s’implante à l’emplacement de l’ancienne tour Isabe. “La démolition de l’immeuble a été un moment fort, chargé d’émotion pour les habitants. Ce nouvel aménagement était donc très attendu, aussi bien par les riverains que par la maîtrise d’ouvrage. Nous savions que nous n’avions pas vraiment le droit à l’erreur”, introduit Marine Lejamtel, cheffe de projet à l’agence Base.
La démolition de l’immeuble a été un moment fort pour les habitants, rendant ce nouvel aménagement très attendu, tant par les riverains que par la maîtrise d’ouvrage. Le projet a été conçu dans une démarche de concertation, menée avec le collectif Bruit du frigo, présent sur le terrain en tant que médiateur à l’écoute des envies du quartier.
Un projet sur mesure pour les habitants
Pour repenser ces lieux, le projet s’est appuyé sur une démarche de concertation menée auprès des habitants. L’équipe a travaillé en partenariat avec le collectif Bruit du frigo, qualifié d’“oreille” du quartier, qui a assuré une présence de terrain et un rôle de médiation.
Elle poursuit : “L’objectif était d’aller à la rencontre de tous les publics, en sortant du format classique de la réunion publique en soirée, souvent peu représentative de la diversité des usagers.”
Des ateliers ludiques et participatifs ont mobilisé un large éventail de profils, notamment les jeunes et les familles. De ces échanges sont nées des envies très concrètes, comme la création d’une cabane pour les tout-petits, ou encore le souhait de voir davantage de fleurs dans les aménagements.
La programmation de l’extension est riche et diversifiée, tout en préservant l’esprit de parc urbain. Pour cela, de nombreuses plantations viennent structurer et rythmer les espaces.
Recoudre le quartier, franchir l’avenue
Le projet prolonge la trame de cheminement nord-sud du premier parc au-delà de l’avenue de Saragosse, afin d’assurer une continuité de parc. “L’enjeu était de créer un parvis paysager continu, traversant l’avenue pour garantir la fluidité des circulations piétonnes et renforcer l’unité du parc”, explique Marine Lejamtel. Ce nouvel axe dégage également une vaste prairie centrale, ouverte et bien cadrée, qui constitue le coeur paysager du parc. En réponse aux attentes exprimées lors de la concertation, l’extension intègre une programmation riche et différenciante.
Sur la partie ouest, une zone de fitness en plein air a été aménagée, pensée comme une salle de sport inclusive à ciel ouvert. Elle s’accompagne d’un bloc d’escalade sur mesure, réalisé en béton projeté sur une maille métallique. Le parc accueille également un espace de Parkour, situé au nord du si te, inédit à l ’échelle de l’agglomération. “Cet aménagement visent à faire du parc un lieu de destination à l’échelle de la métropole de Pau, pour attirer un public extérieur au quartier et participer à son changement d’image”, souligne la cheffe de projet. En réponse à une demande formulée par les assistantes maternelles du s ecteur, une aire d e jeux sur mesure dédiée aux enfants de moins de 3 ans a été conçue, dans un univers ludique original, adapté à cette tranche d’âge jusque-là peu représentée. La maîtrise d’ouvrage souhaitait également intégrer un espace rafraîchissant pour les périodes estivales. “Plusieurs scénarios ont été étudiés. La solution d’une fontaine impliquait la mise en place d’un local technique, d’un système de filtration et de circulation, avec des coûts et une maintenance conséquents pour la collectivité. Le choix s’est finalement porté sur une piscine de brumisation équipée de plusieurs mâts. Cette solution est plus sobre en ressources et en entretien, car elle ne nécessite ni stockage d’eau, ni filtration”, explique Marine Lejamtel.
Pour compléter l’aménagement, des tables de pique-nique ont été installées au coeur d’un verger planté d’essences typiques du Béarn.
À la demande des assistantes maternelles, une aire de jeux sur mesure a été créée pour les moins de 3 ans, dans un univers ludique adapté à cette tranche d’âge jusqu’alors peu représentée.
Ambiance végétale entre lumière, fraîcheur et biodiversité
Le projet s’appuie sur une composition paysagère soignée. “L’enjeu était d’intégrer de multiples usages dans un espace contraint, tout en préservant une ambiance de parc”, partage la responsable.
Sur la frange ouest, l’aménagement prolonge l’atmosphère du nord du parc central, en misant sur une palette végétale lumineuse et légère avec des feuillages fins pour des ombrages tamisés et des teintes acides de jaunes, de verts tendres et de blancs : Celtis australis, Gledistia triacanthos ‘Sunburst’, Quercus acutissima, Quercus phellos, Ostrya carpinifolia pour les arbres, Medicago arborea, Hebe microphylla, Cistus x florentinus pour les arbustes.
À l’est, l’ambiance devient plus dense et luxuriante. La végétation s’étoffe a vec d es feuillages larges e t des essences singulières, telles que le Kalopanax septemlobus. Autour du mur d’escalade, la palette s’inspire des milieux forestiers pyrénéens, associant chênes et érables aux conifères déjà présents. Le parvis, quant à lui, a été traité avec une végétation basse composée de plantes tapissantes et de massifs arbustifs (Cistus loreti, Cistus x corbariensis, Hebe kirkii, Spirea albiflora), assurant une présence végétale forte tout en préservant les perspectives et la lisibilité des espaces. Répondant au souhait des habitants de voir revenir les fleurs dans l’espace public, le projet intègre 1 300 m² de prairies fleuries. Des jardins familiaux complètent la proposition, rencontrant un franc succès auprès des riverains !
Un bloc d’escalade sur mesure, un espace de parkour et une zone de fitness composent une offre sportive différenciante à l’échelle de l’Agglomération, pensée pour changer l’image du quartier et attirer un public extérieur.
Une maîtrise d’ouvrage engagée, des services mobilisés
L’ensemble des plantations a été conçu en étroite collaboration avec les services de la Ville, et une partie des végétaux a été produite dans les serres municipales. “C’est l’une des vraies réussites du projet : il a été concerté aussi bien avec les habitants qu’avec les services de la Ville”, se remémore Marine Lejamtel. Le parc ne dispose pas d’un système d ’arrosage automatique. L’approche retenue est volontairement sobre et adaptée aux conditions climatiques locales. À Pau, l’ensoleillement combiné à d es précipitations régulières permet une végétation naturellement généreuse. Un réseau de bouches d’arrosage a néanmoins été prévu tous les 50 mètres, afin de raccorder un tuyau ou de remplir une citerne si besoin.
Depuis l’été 2023, les habitants profitent pleinement des nouveaux aménagements. “Les retours sont excellents et les dégradations quasi inexistantes. La population s’est véritablement appropriée le parc”, conlut-elle. Ce projet paysager, à l’échelle du quartier, a valu à la Ville de remporter la Victoire d’Argent aux Victoires du paysages 2024, dans la catégorie “Quartier de logements sociaux et requalification de quartier”.